Au fil des commentaires du billet précédent, la question du soleil et du vieillissement de la peau ont été évoqués. Mais qu'en serait-il d'un monde sans soleil ? Non pas celui du Commandant Cousteau, mais celui des villes en sous-sol, des mondes parallèles au nôtre, des cités enterrées, de leur codes, de leur culture, de leur... citoyens ? Car ces mondes existent, Jennifer -courageuse envoyée spéciale Planète- les a rencontrés pour nous à New York...
Certains d'entre vous se sont sans doute amusés à visiter les égoûts de Paris, ou les catacombes près de Rome. Ou bien, encore plus hypes et branchés, vous êtes vous retrouvés à 15 mètres sous terre, au son d'une techno enragée et à la lueur des flambeaux pour une nuit gothique ou jeunesse dorée branchée courant après les sensations.
Mais saviez-vous que d'innombrables individus peuplent les sous-sol de nos villes et n'en sortent quasiment jamais, envoyant à la surface, des "éclaireurs" qui vont récupérer des vivres, des médocs, des sous...
Revenons à New York donc et plus précisément Manhattan, pourtant pas si vieux...
On estime qu'actuellement environ 6 000 personnes (en réalité, très certainement bien plus), hommes, femmes, enfants, bébés, vieillards, vivent sous terre en permanence, dans les entrelacs des voies du métro, d'anciens tunnels condamnés, de tunnels techniques théoriquement emmurés, de vieilles voies d'eau ou d'acheminement de pierres de carrière ou de charbon, de salles des machines oubliées...
La gare centrale de New York, "Grand Central" s'appuie sur 7 couches de tunnels, du plus ancien au plus récent. Et à certains endroits, les sous-sols sont situés à des profondeurs équivalentes à des immeubles de 30 étages !
Plus incroyable encore, au 19ème, la haute société new-yorkaise avait bâti sa propre ligne de métro afin de ne pas se mélanger à la populace. Cette ligne partait du sud de Central Park jusqu'à Long Island. Elle n'a servi que deux ans avant d'être submergée par les eaux de l'Hudson. Dommage, car les stations, salles d'attente et voitures étaient aménagées avec luxe : lustres en cristal de Bohême ou verre de Murano, tapisseries et brocards, velours et soie...
En fait, ma guide m'a confirmée que nulle carte complète des sous-sols de New York n'existe. C'est un territoire inexploré et dangereux où police et pompiers n'interviennent jamais. Des vieux plans par ici, des "blues prints" oubliés ou perdus par là. La mémoire des anciens bâtisseurs est depuis longtemps envolée et dans une ville où tout va si vite, on se moque finalement pas mal de ce qui se passe en-dessous. En outre, Manhattan étant bâti sur un bloc de granit, les sous-sols et leurs innombrables cavités ne posent pas vraiment de problème de solidité...
Qui sont ces gens ? des sans abris, des fuyards, des junkies, des malheureux qui trouvent dans les sous-sols un abris d'infortune et reconstituent diverses sociétés afin de survivre. On descend sous terre et on y reste, on y vit, on y meurt. Espérance de vie maximale : 2 ans. Par manque de soleil, de nutrition équilibrée, de soins. En raison de la violence, de la criminalité, de la drogue, de l'alcool, des maladies, voire épidémies d'un autre temps qui ravagent ces communautés.
Mais on y naît également...
"Le Peuple des Taupes" (The Mole People) a pris l'habitude de l'obscurité et des bruits singuliers qui règnent sous terre. Ils communiquent à des kilomètres en tapant sur les conduites. Certains ne remontent plus jamais "en haut". Peur de la foule, peur de la lumière, peur de l'air libre. Les "éclaireurs" ou "coursiers" (Runners) font les courses à la surface.
Des maisons de fortune. Une nourriture de bric et de broc, sans compter le gibier qui pullule en sous-sol : notamment les track rabbits (ou si vous préférez, de bons gros rats, et à l'occasion des vers)... Les Taupes font la cuisine sur des brasiers de planches et de détritus et utilisent l'électricité et l'eau des innombrables conduites qui les environnent.
L'une de ces communautés est connue pour avoir sa propre école. Les quelques enfants qui la fréquentent sont en rupture de banc de la société, amenés là par des mères fuyant les services sociaux trop empressés à les leur prendre, ou un père violent, ou tous les malheurs de l'existence.
Une autre s'est installée dans les reliques de la luxueuse ligne décrite plus haut où ce qu'il en reste. Des sans-abris sous les lambris, jouant sur les restes d'un immense piano à queue.
Hollywood -en manque chronique de bons scénars- pourrait aller jeter un oeil sur les histoires de ces gens des sous-sols.. un jour, peut-être, quand l'industrie du cinéma se fera moins bête ?
Et vous, cela vous tenterait une incursion là où le soleil ne passe pas ? On organise une cordée ? Je serais curieuse quant à moi de découvrir à présent les vrais "mystères de Paris"...
Dernière heure : sans doute ai-je bouclé mon billet trop vite : Jennifer attire mon attention sur le fait qu'outre la détresse qui pousse ces milliers de gens à descendre sous terre, l'instinct des hommes de se réfugier dans les grottes et les entrailles de la Terre depuis toujours doit aussi être souligné. Certains se "retrouvent" sous terre, dans l'obscurité et dans un milieu qui ne connait plus ni le temps ni les saisons. Elle me rappelle les expériences menées par certains scientifiques ayant passés des mois dans des grottes, coupés du monde, et ayant énormément de difficultés de réadaptation à la vie à la surface...
Deuxième dernière heure, et j'en remercie Dom notre Ménagère, qui me transmet le lien suivant, "Hell's Basement Tunnel", évoquant en fait l'existence de plus de 30 000 personnes vivant sous NY, sans compter les enfants... !
Suivre cette cordée, les photos sont saisissantes >
"si vous viviez ici, vous seriez déjà à la maison...."
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