Après les jeunes invisibles ICI, les salariés invisibles ICI, les femmes invisibles ICI, voici les quadras et les quinquas invisibles, dans la France de 2007.
C'est un bien vieux pays qui n'aime pas ses "vieux" (à partir de 40 ans) et qui n'aime pas ses "jeunes".
Le désespoir est une défaite anticipée et la France vogue vers le néant, toutes voiles dehors et nous dedans.
Chapeau, une telle débandade n'avait pas été observée depuis l'an 39 de l'autre siècle.
Le pays est à l'arrêt dans un monde qui tourne sans lui, et comme disait Coluche, un truc qui n'avance pas, ça recule.
Au plan boulot, les gens qui décident semblent avoir pris le pire du libéralisme anglo-saxon, en omettant le meilleur (spontanéité, imagination, ouverture, efficacité) et l'ont mélangé au centralisme, à une singulière frilosité de laquais, aux idées toutes faites-mal faites, mieux portées dans la France du XXIème que les tailleurs Chanel sur le dos des ministresses !
Pour votre gouverne, Messieurs et Mesdames les "réducteurs de tête", les quadras-quinquas ne sont pas des "CSP" (encore une invention française !), ou des spécimens exotiques épinglées sur un tableau de statistiques, mais des individus dotés de talents, de recul, de sang froid et de maturité.
Ceci vous dépasse ? Sans doute... Il est vrai que cela s'apprend dans une seule Grande Ecole : celle de la Vie.
Je passe le micro à Môsieur Resse qui a fait le point dans ses colonnes avec les gouvernants potentiels (je le trouve très poli Resse, ayant également parfois l'envie de dire les choses vertement, mais l'insulte et le mépris ne sont pas de bons compagnons sur la route encore longue de notre jeune vie !) :
"Vous aurez, François Bayrou, 56 ans en mai. Entre temps, vous aurez eu, peut-être, rendez-vous avec l'histoire. Ce printemps vous aurait offert cet incroyable cadeau d'anniversaire: la confiance de vos concitoyens, pour assumer cinq ans leur destinée. Belle trajectoire pour un homme qui, en ses jeunes années, labourait un champ dans le Béarn. Bravo.
Ou bien, ce serait vous, Ségolène Royal. Qui êtes de 2 ans sa cadette.
Il n'est guère distingué de rappeler leur âge aux dames. Mais la
transparence politique a des exigences... 54 ans à l'automne, vous êtes
née un "22 septembre", titre d'une jolie chanson de Brassens. On sait
l'enfance difficile qui fut la vôtre. Avoir su dépasser les douleurs
des jeunes années, et s'en nourrir peut-être pour bâtir ses ambitions
présentes, cette réussite mérite un bravo.
Sinon, ce serait à vous, Nicolas Sarkozy, qu'auraient été remises les
clés de la France. Des trois, vous êtes le benjamin. 52 ans aux
derniers jours de janvier. Ce serait un beau résultat, pour celui qui
nous confie-t-on sur le net, "fut assez mauvais élève, et redoubla sa
sixième au lycée public Chaptal". Heureuse destinée qui prouve qu'on
peut avec la volonté surmonter un échec. Pour cela, bravo.
Quiconque, de vous trois, sortira vainqueur, symbolisera donc un net rajeunissement de la direction politique du pays, sinon le renouvellement des visages, les vôtres illustrant notre quotidien depuis quelques années déjà. N'importe! Vous arrivez à ces âges où l'on est, - en politique -, "en pleine force de l'âge". Où l'âge n'est pas un frein. Ou l'âge au contraire, vous porte, et jusqu'aux plus hautes responsabilités.
Rien que pour cela, vous avez eu raison, je vous le confirme, d'oser cette voie difficile qu’est la politique.
Car pour ne rien vous cacher, j'ai trois années de moins que le plus jeune d'entre vous. 49 ans. Maîtrise de psychologie, DESS de communication obtenu avec mention dans une des écoles les plus cotées du métier, le Celsa. Mon mémoire de DESS reçut la meilleure note jamais donnée à ce type de travail (du moins jusqu'au millésime 1998... après, je n'ai pas vérifié). Jugé "excellent" par un jury de Docteurs, il circulait encore plusieurs années après, comme une référence proposée aux étudiants (hec, écoles de com) venus observer la culture de cette entreprise de médias où je travaillais alors.
Pourtant, je suis de ces individus qui, à pas même cinquante ans, voient les portes de l'emploi bientôt se refermer, comme celles du pénitencier de la chanson. Toutes les annonces auxquelles je réagis se concluent par les mêmes réponses, standardisées, polies, politiquement très correctes... "malgré tout l'intérêt que présente votre candidature..."
Je m'en étonne auprès de recruteurs. J’obtiens deux types de réponses.
La première émane de ceux qui m'auront répondu: « votre âge? Non !! A 49 ans, fort heureusement, on n'est pas encore "trop vieux" pour ce type de poste !... Simplement, nous avons trouvé un profil correspondant davantage que le vôtre... Voilà tout... » Foin des viles suspicions, mon vieux! "Discrimination" ? Vous voulez rire ?
La seconde réponse vient de recruteurs "neutres", qui n'évoquent pas ma candidature, mais l'état du marché: « bien sur, que votre âge est un handicap ! Sauf exception, personne ne recrute plus sur annonce AU DELA DE 40 ANS!... Alors, 49, vous pensez !! »
Voilà le pays que vous aller diriger, Madame, Monsieur. Celui où du fait de votre tranche d'âge, on ne veut plus de vous, contrairement à la vôtre... qui pourtant est la même.
Tout le monde évoque la difficile intégration des jeunes de banlieues, les discriminations au patronyme, au faciès, à l'adresse de résidence. Je n'en disconviens pas.
Cependant, toutes les études sérieuses entreprises sur ces sujets indiquent que la première discrimination est celle qui touche les seniors. Et semble-t-il, de plus en plus tôt. Pourquoi dès lors, ne s'en préoccupe-t-on pas ?
La réponse est simple. Les quinquas pètent pas les vitrines. Les quinquas crament pas les bagnoles. Les quinquas hurlent pas leur rage et leur haine. Les quinquas se lancent pas dans le slam assassin, ou le rap qui arrache, ou le métal qui tâche. Pas que l'envie leur manque, d'ailleurs. Mais les quinquas ont parfois de l'arthrose ou des kilos en trop, et donc pas l'assurance de pétave leur mère aux compagnies de keufs, aux bleus, aux CRS. Alors ils font le gros dos. Serrent les dents. Deviennent peu à peu réacs, aigris, avec au cœur cet autre genre de haine qui monte, et ne se défoule qu'au fond des isoloirs. Ca n'est guère reluisant. Je ne suis pas sûr que la plupart en soient au fond très fiers.
Permettez moi de vous donner un conseil. (d'habitude, j'en vends. Du moins, j'en vendais !) : lorsque vous en serez au conseil des ministres du mercredi, quand l'ordre du jour appellera la communication des politiques d'emploi par le ministre du travail, mettez donc les bons résultats au crédit de votre politique. A aucun moment n'allez songer à la présente lettre que de toutes façons vous n'aurez pas lue. Evitez de penser à tous les quinquas, ou quadras, même, cadres ou non, tous plus jeunes que vous, qui sont pourtant déjà trop vieux pour travailler, qu’on a sorti des chiffres par quelque ruse habile. Ca vous gâcherait le plaisir; et notre pays n'est pas en si grande forme qu'on pût s'autoriser à mettre son ou sa présidente de méchante humeur pour des fariboles statistiques...
En revanche, songez-y un instant, tout de même, quand vous en viendrez au volumineux dossier "retraites". Et qu'il vous faudra convaincre les français de travailler cinq à six ans de plus, alors qu'un bon paquet aura déjà été sorti du manège depuis dix ans au moins.
Bonne chance à vous, Madame, Monsieur, pour ce nouveau job, du moins au meilleur de vous trois, qui aura su décrocher la queue du Mickey Républicain.
Merci de me retourner vos bons voeux. A défaut de considération, je crois, ou plutôt, je crains, d'en avoir pour l’avenir le plus sérieux besoin.
Votre dévoué Hervé Resse ("pire... mais de moins en moins...")"
Que celui ou celle qui souhaite faire suivre et accommoder à sa sauce le fasse avec la bénédiction de Môsieur Resse et mes encouragements chaleureux.
J'ai mal à ma France, je me refuse à croire qu'elle soit redevenue ce "massacre de gens qui ne se connaissent pas, au profit de gens qui se connaissent mais ne se massacrent pas ?"(librement adapté de Paul Valéry sur la guerre...)
Manifeste repris chez Yves, Sophie, François, Costanza, Lorenzo, Karine (20 Minutes), Quitter la Sécu, Beber, Fanette, Guillaume (à compléter en allant chez RESSE ICI)
Les commentaires récents