Cath : Bonjour Emmanuel ou plutôt dois-je t'appeler "Bouchon", je suis enchantée de t'accueillir sur la planète et donc, hummm, par où allons nous commencer ?
Bouchon : Etant très bavard, je ne sais déjà pas par où commencer...
C : (rires) Et bien, ça commence bien !
B : Bon, comme tu le sais, je suis sommelier.
Cela fait onze ans maintenant que je fais ce métier.
Au départ je voulais être chef de cuisine, mais je me suis très vite aperçu que cela ne m'intéressait pas vraiment.
Et un jour j'ai pu discuter avec un sommelier, et là, je me suis dit que je voulais faire ça !
Echanger, partager, avoir cette culture du vin et donc de ce patrimoine typiquement français.
C : (yeux brillants d'émotion) Génial, de découvrir, si jeune, une telle passion dont on peut faire métier !
B : Pas vrai ? Donc, du jour au lendemain je me suis plongé dans les livres, je me suis mis à collectionner les étiquettes de vin, à fouiner dans les caves et me rendre dans les ventes aux enchères afin de mirer les très vieux flacons.
C : (rires) Les vieux flacons dans lesquels on découvre les meilleurs vins !
B : Parfois, oui. L'apprentissage fut difficile mais très enrichissant.
A l'Hôtel Vernet,
la deuxième étoile Michelin est venu récompenser le travail de toute une
équipe de cuisine menée par Alain Solivérès (maintenant chez
Taillevent) et l'équipe de salle. C'était en 1996.
Cette année là, j'avais participé à mon premier concours, et ai terminé quatrième.
C'était le Concours Chapoutier du meilleur étudiant sommelier de France
96.
J'avais passé toute la nuit précédente dans un bus de supporters
du PSG, de retour de la finale de la Coupe d'Europe gagnée, à Bruxelles
! Je dois te dire que j'étais complètement cassé ! (grand rire puis gros gros soupir)...
C : (béate) Non, c'est pas vrai ?!
B : Je suis né comme ça (rires). Donc, ensuite, direction le Service National en 96, pour le compte du Mess du Cabinet du ministre de la Défense. L'ennui... total....
C: Tu en as fait des choses en 96....
B : Tiens, c'est vrai ça ! (rires)
Bon, ensuite, le dur apprentissage du monde professionnel.
Une petite année au restaurant Guy Savoy, comme commis sommelier, les
horaires terrifiants, une grande cuisine, mais le souvenir d'une
période très dure.
Puis, ce sera La Tour d'Argent, qui m'accueillera pour une année, afin de
remplacer un ami parti au Service National. Un vrai bonheur ! 2 étoiles
à l'époque.
Une révélation ! La cave magistrale de 500 000 bouteilles, 15
sommeliers, 9 000 vins sur la Carte des Vins, un service au diapason,
un profond respect pour le service des vins, le ballet continuel des
maîtres d'hôtel en queue de pie...un tout autre univers.
[coupure ici / en bref, la Suisse chez Roland Pierroz à Verbier, puis l'Angleterre avec l'"Award of Excellence" du Wine Spectator Magazine qui récompense les belles cartes des vins. 120 références
seulement mais étalées sur 20 pays du monde. Bouchon n'avait que 25 ans].
C : (se tortillant sur sa chaise) Alors, après, raconte !
B : Oui, oui, donc retour au pays, au Restaurant Alain Ducasse au Plaza Athénée (3
étoiles), un luxe impressionnant, le souci permanent du détail, la
recherche de la perfection.
Puis, afin d'en apprendre plus après deux ans, direction Lasserre (2
étoiles), qui m'a rappellé un peu l'ambiance de La Tour d'Argent, qui
sied aux vielles maisons emplies d'histoire, telles des bibliothèques
d'un certain patrimoine culinaire français.
C'est en 2004, que j'arrive au Fouquet's après une parenthèse de
quelques mois, très difficile à vivre, où je recherchais du travail.
Cinq mois où je réfléchissais à mon futur projet : donner des cours
d'oenologie à domicile.
Mais je n'étais pas prêt. J'accepte donc de travailler au Fouquet's, en
sachant bien que je ne retrouverai pas le prestige des grandes maisons
où j'avais travaillé avant.
Voici bientôt 3 ans que j'y suis. Je m'y ennuie terriblement. Aucune
perspective d'avenir avec les anciens dirigeants, de nouveaux viennent
d'arriver, je leur laisse le temps de se positionner...et on verra.
C : (attristée) C'est dur, après tout ce que tu as fait et la passion que tu as mis en tout, d'en être là...
B : Oui, mais voici mon but ajourd'hui : quitter le domaine de la restauration, bien trop prenant en terme d'horaires, et trop restrictif pour un sommelier.
Les moyens ne sont plus les mêmes qu'il y a quelques années, les directeurs d'achat prennent le relais du sommelier. (soupir)
Alors, en parallèle de mon travail, j'ai trouvé un partenaire qui me
permet de facturer mes prestations : une société de portage salarial,
ABCPortage. Rencontre avec un jeune stagiaire, il m'écoute, et arrive à convaincre
le gérant de m'aider. Grâce à eux, je peux partir à la recherche de mes premiers clients.
18 mois après, j'ai réussi à développer mes prestations.
Travaillant au Fouquet's du lundi au vendredi inclus, de 12 h à minuit trente, je bénéficie de mes week ends.
Alors, durant ceux-là, je bosse à mon compte ! (grand sourire)
Trois week-ends sur quatre, je donne des formations pour la société Vigne et
Sens. Elles durent 3 ou 6 heures. Initiation à la dégustation des vins,
aux accords mets et vins, ou une journée entière, parfois un week end
entier pour rendre le vin plus accessible.
C : (visiblement sonnée par un tel emploi du temps) Heu... Et la clientèle ?
B : Des particuliers de tous milieux, internautes forcément, via le site www.vigne-et-sens.com.
Je ne suis que prestataire, mais j'essaie d'aider au développement avec
Corélie Vinault, la gérante. Les stages se remplissent, à tel point,
que j'enchaine souvent 22 jours avant d'avoir un vrai week-end libre
pour moi !
La semaine prochaine, nous allons recevoir des verres Mikasa, superbes
pour la dégustation. Une forme de partenariat que j'ai avec eux, j'en
fait profiter Vigne et Sens.
C : Ils sont très beaux ces verres, tu pourrais m'en avoir ? (rires)
B : Aucun problème, avec plaisir ! (rires)
Alors, tu sais, durant ce week-end libre, je file voir Stéphane ou alors c'est
Stéphane qui vient, afin de filmer, de partir à la rencontre de chefs,
de sommeliers, de vignerons.
Si je m'occupe de la partie sommelerie de la chaine thématique de Cuisinerenligne.fr : Sommelierenligne.fr, c'est parce que nous avons le même état d'esprit
avec Stéphane.
C : Oui, Stéphane est très chouette. Quoique pas mal aux taquets lui-aussi ! Comment vous êtes-vous rencontrés au fait ?
B : Nous nous sommes rencontrés un matin en avril 2006.
Même si nous réagissons différemment. Stéphane est très à l'aise en
public, il sait captiver l'attention, et parler concrètement de ses
objectifs, de son projet, il sait se montrer convaincant.
Pour moi, c'est plus compliqué, car je ne sais pas encore exactement où
cette aventure peut me mener... je ne me fixe absolument aucune
barrière, aucune limite.
Seulement, à 31 ans, je commence à ressentir les effets de la fatigue,
cette vie est captivante mais éreintante ! Les nuits très courtes, mais
je suis content ainsi, je sais que tout travail se paie dans la vie.
C : Oui, et que tout ce travail paie aussi forcément, donc !
B : Bien voilà ! Sommelierenligne.fr est une continuité logique au blog, car il intègre
les vidéos et permet de visualiser plus aisément les gestes techniques.
Le blog Sommelier-vins.com ouvert voilà 18 mois, quant à lui, me permet d'exposer
quelques théories, de faire passer des messages, de simplifier le monde pourtant si complexe du vin.
Rendre accessible cet
univers magique. Faire prendre conscience que le vin est le fruit d'un
travail immense, de la nature, sublimée par la main de l'homme.
Faire prendre conscience que la dégustation du vin n'a pour seul
intérêt que le plaisir des sens mais le plaisir tout court. Simplement
prendre conscience que déguster un vin, c'est avant tout accepter d'exprimer par ses propres mots, ses sensations.
Bien entendu, il faudra du temps avant de savoir décrypter
l'architecture d'un vin, mais il suffit d'accepter d'apprendre, de
déguster, et de prendre le temps de comprendre.
Il faut en avoir dégusté pour espérer se familiariser avec eux,
accepter de trébucher, de se tromper, d'être déçu pour se sentir à
l'aise en leur compagnie.
C : Revenons-en au blog, si tu veux bien...
B : Le blog donc, c'est un billet tous les 3 jours en moyenne, 230 depuis
son ouverture, plus d'un million de pages lues et 250 000 visiteurs
uniques.
30 000 visiteurs uniques en décembre, et une moyenne de 800 visiteurs par
jour.
Je n'aurai pas imaginé en arriver à ces chiffres !
C : Bon vin ne saurait mentir ! (rires). Peux-tu nous résumer, brièvement, tes projets réalisés ?
B : Elaboration d' une sélection de vins pour un grand groupe de traiteur,
qui a ouvert sa boutique rue de Prony dans le 17ème arrondissement de Paris : Gus Atelier Gourmand.
Je travaille sur la deuxième boutique, tout en redynamisant la première : mise
en valeur des linéaires, formation du personnel, intégration de
références plus "parlantes".
Le choix a été porté sur des vins de
terroirs, peu connus. 25 vins, pas plus. (pause)
Puis lancement d'une collection de vins, pour le compte d'une société de
cosmétiques, à destination de la vente directe en Asie. Mais là, ils
utilisent mon nom pour cautionner la sélection que je sélectionne avec
eux. Néanmoins, je ne suis pas tout à fait convaincu par leurs
arguments et je pense m'éclipser du projet...
Et puis, quelques projets à peaufiner pour l'étranger, mais je prend du recul, ne pouvant tout faire.
C : Mais alors, à part ça, "la vie de Bouchon", c'est quoi ?
B : C'est bien simple, je n'ai plus un moment à moi ! (rires) Je dois avoir le sens des priorités.
Désormais, je ne peux plus vraiment répondre aux demandes de devis d'entreprises, les soirées je les passe au restaurant.
Et je me dis que je dois travailler sur la communication, me faire connaitre, par mon blog et sommelierenligne.fr.
La réussite de mon projet professionnel passe par le succès de la
communication des blogs.
Je rêve de faire sommelier consultant, tel un
sommelier de restaurant hors de son restaurant, qui ferait découvrir à
tous un univers magique, celui des vins...
Finies les contraintes de la restauration, bonjour les angoisses du consultant ou de l'entrepreneur...
Si les contours du projet ne sont pas encore bien dessinés, c'est pour
ne pas m'enfermer dans des certitudes, qui seraient trop étriquées.
Euh, Cath, je t'avais bien dit que j'étais bavard, non ? (gros éclats de rire de part et d'autre...)
Les blogs de Bouchon :
Sommelier-vins.com
et avec Stéphane de Cuisinerenligne > Sommelierenligne
Les sites/lieux à visiter :
www.vigne-et-sens.com
Gus Atelier Gourmand
Le collage en entrée de post est une oeuvre de Roswitha Guillemin, avec sa permission, sa gentillesse et son immense talent ! ;)
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