Voilà, elle est partie Chantal. Seule et sans bruit.
Ca s'agite de partout. Pour le coup, ça fait du bruit. Un bruit sale et confus.
Rien à voir avec la limpidité des paroles de Chantal et l'harmonie de ses mots. Comment faisait-elle pour être encore aussi puissante dans ses interventions, elle qui n'avait plus de mâchoire supérieure ?
Un bruit donc, comme dans une cour pleine de volatiles énervés par les mouches...
Mais de quoi est-elle morte ?
Alors ça pérore à la télé. Drapé dans le sérieux que confère un ton grave, à défaut d'autre chose, ça nous explique, à nous pauvres balles, que rien n'est simple en matière d'euthanasie.
Ca fait du remplissage et ça déclare qu'il ne faut pas agir sous le coup de l'émotion.
Celle-là, elle est belle alors tiens : "ne pas agir sous le coup de l'émotion".
Si ce n'est pas une insulte de plus pour celles et ceux qui ont la conviction que la mort se confronte avec dignité, je ne sais pas ce que c'est !
En attendant, émotion ou pas, ils l'ont bel et bien ouverte, Chantal, pour savoir de quoi elle était morte. Histoire de se couvrir. Histoire de désigner un coupable. Histoire de dévier le tir.
Ils l'ont ouverte sans demander la permission de sa famille. Mais dans quel pays vivons-nous ?
Bravo Chantal. Ta blague ultime. Tu les as bien eus. Ils n'ont "rien" trouvé !
Alors, remettons un peu en perspective quand tout a l'air de foirer grave.
Si au moment d'abolir la peine de mort, François Mitterrand s'était torturé le bulbe en se disant que rien n'est simple : "faut-il abolir la peine capitale pour les crimes passionnels mais la maintenir pour les tueurs d'enfants, l'abolir pour les malades mentaux tout en la maintenant pour les serial killers (mais comment reconnaître les uns des autres ?)", on continuerait à en faire éternuer quelques-uns dans la sciure...
Je doute que l'on oublie Chantal de si tôt. Certains s'emploient déjà à sa mémoire et ne lâcheront pas le morceau, car au-delà des images et du bruit, il y a quand même des êtres humains dotés de force et d'âme. De conviction et de mots vrais.
Beaucoup de femmes aussi. Comme des pitt bulls, quand elles tiennent un os, les nanas, elles ne laissent pas facilement tomber...
On se souvient ces jours-ci de Mai 68. Si à l'époque, certain(e)s n'avaient pas fait de "spectacle" et du "tintouin" (défiler dans les rues, coller des manifestes sur les murs, hurler comme des harpies à la téloche), on n'aurait pas eu accès à la contraception aussi rapidement, ni le droit à l'avortement (réglementé).
Combien de femmes seraient encore parties Outre-Manche se faire avorter (et encore, pour celles disposant de moyens !) et combien d'autres, les plus misérables, les plus seules, se seraient faites charcuter ou saigner par la tricoteuse du coin...
Il faut y penser avant de méditer sur l'histoire de Chantal et sur notre histoire personnelle restant encore à écrire...
Il faut toujours songer que rien ne s'obtient dans la douceur et
dans la grâce.
Mais dans la douleur et la disgrâce.
Ce sont ceux qui
hurlent le plus fort qui ont des chances de se faire entendre.
Ainsi va le monde imbécile, lâche et sourd.
Si un jour je suis à l'agonie, seule, sans entourage, et sans moyens financiers, je ne vois pas comment je pourrais mettre un turbo à mon lit de souffrances pour le propulser à l'étranger, en Suisse ou en Hollande...
Je me vois encore moins laisser des inconnus me plonger dans un coma (dont on ne sait rien, ni des sensations ni des pensées qui le hante), comme un animal qu'on endort avant de lui donner le coup de grâce.
Le droit à une mort digne et volontaire est aussi important qu'une
vie digne et debout.
Ou alors, cela signifie qu'on n'accorde pas tant
d'importance à la vie, aussi "sacrée" soit-elle prétendue..
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